lundi 8 avril 2019

La politique passionnément, à la folie....

Ma mère disait souvent que la politique avait tuée mon père, aussi. 
Un plus que passionné qui a pris parti à toutes les étapes importantes de sa vie. C'est ses parents qui ont décidé de partir de l'Italie Mussolinienne en 1927. Mon grand-père avait 41 ans, quatre enfants, et mon père en avait sept. A vingt ans, réfractaire, il refuse l'annexion de la Moselle et part en zone libre avec ses patrons et amis. Revenu vivant d'un stalag, il aura toujours à cœur l'avenir de son pays d'adoption, et en particulier après cette guerre dont il a vu, en revenant du pire, toutes ces villes ravagées, détruites. Il donnera de son temps et de son argent lorsqu'il en aura gagné via d'abord le Canada, un Eldorado où mes parents et leurs fils ont vécu presque 5 ans. Il donnera oui de sa santé et se fera aussi des ennemis.
Ma mère râlait encore après la mort de mon père, elle que la politique intéressait presque autant. Elle avait été Gaulliste jusqu'à la mort de ce dernier et ensuite votera à Gauche le reste de sa vie. Ses jugements étaient profonds et intelligents.

Très tôt j'ai été gagnée par ce souffle-là, l'intense désir de croire qu'on peut changer la vie en votant, au moins cela. Anar d'origine j'ai voté pour la première fois au deuxième tour des élections de 1981. Et j'ai toujours vécu ce paradoxe, puisque les anarchistes prônent le plus souvent l'abstention et par principe. Mais le souffle de l'Histoire me rattrape toujours. Même à des époques où je ne regardais plus la télévision j'étais chargée des ambiances politiques du moment et celles du le monde avec. L'indifférence jusqu'à aujourd'hui ne m'a pas gagnée.
A la toute fin des années 80, en 1989 je suis et je pourrais presque dire, j'en suis devenue folle. La politique n'était pas la seule coupable, mais j'en reste toujours traversée comme une lame de fond. J'ai vu la chute du mur de Berlin en proie à une dépression stuporeuse. Stupeur et craintes. Honte d'avoir marché seule sur l'autoroute - sans en mourir - me disant que je marchais pour la Roumanie menacée de destruction par ses dirigeants, comme pour donner une raison à ma folie. Et j'ai vu quelques semaines plus tard le couple Ceaucescu vaciller sur le balcon où ils se sont fait huer par un peuple muselé jusque-là jusqu'au sang et ensuite je les ai vu morts comme des chiffons sales après une parodie de jugement. A l'envers, j'avais honte quand j'aurais du être fière de cette inspiration qui me guide, et mal parfois.
Je suis restée 20 ans sans plus me faire hospitaliser. Jamais indifférente pourtant à tout ce qui se passait sur la scène politique.
Le 17 novembre est une date que beaucoup évoque aujourd'hui. Le début du soulèvement des gilets jaunes. Elle fait à présent référence. Mais pour moi c'est aussi la date anniversaire de la mort de mon père qui ne m'a jamais laissée indifférente, loin de là.
Je sais pour avoir une bonne mémoire (et j'ai vérifié) que le 17 novembre 2012 avait lieu la première Manif pour tous. J'ai été hospitalisée aussi très peu de temps après.
Il y a comme une coïncidence entre ma vie personnelle et la vie politique, sans que je sois maître à bord de ces tempêtes populaires qui m'entraînent avec elles ou contre elles. Mon inquiétude devient trop puissante. Je suis comme jetée dans des foules auxquelles je ne participe pourtant pas. Je suis concernée corps et âme.
Et cette colère des gilets jaunes je l'avais depuis quelques mois en moi. Ravageuse, elle se mêlait à des colères plus personnelles. Et ce méli-mélo m'envahissait jusqu'au pire, jusqu'à un délire où tout se confondait. Et je ne suis pas la seule personne atteinte de psychose qui se laisse emporter ainsi.

Je me suis calmée. Mais aussi j'ai vu s'opérer des changements sur les chaînes d'info que je honnissais il y a quelques mois, quand la parole n'était donnée quasiment qu'à des macronistes. Et vous pouvez vous repasser le film, c'était ainsi. A présent elles ont pour certaines rectifiées le tir, obligées d'une certaine manière car la foule aussi les a bien forcé à cela. Les journalistes ont été remis en cause et pas pour rien. A qui parlaient-ils jusque-là ?
Je me suis calmée, un peu comme si mon cri solitaire avait été entendu, était répercuté de ronds-points en ronds-points, d'anonymes à qui on donne enfin la parole. Et parlent aussi de la honte - qui m'était commune aussi - qui avait été dépassée grâce à cette lutte commune, comme je l'entendais dans l'émission C Politique d'hier. Et sensible - ça compte tellement dans tout ces mouvements en moi - j'avais les larmes aux yeux et pour de bon.
Je n'ai jamais jugé mes proches à leur bord politique. J'ai eu des amis de droite et de gauche. Mais à présent, et façonnée par les partis pris aussi des chaînes d'info avant la crise des gilets jaunes, je ne supporte plus le discours de la droite, et Macron en est largement, les siens avec. Il me hérisse physiquement. Le pire étant pour moi leur discours commun sur les migrants qui n'a rien envier à l'extrême-droite que l'on a même plus le droit d'appeler ainsi. Calculs politiques qui me sont insupportables. Je ne tiens pas à ouvrir les portes n'importe comment, mais en faire un leit-motiv pour attirer le chaland, me blesse, crée une vraie tension en moi. Cela n'est jamais loin, pour moi, d'une forme de racisme.
J'aime passionnément la politique, j'ai des intuitions très fortes, mais je ne veux plus me laisser emporter comme j'ai pu l'être. Elle ne doit pas être plus forte que moi, une tempête qui me ferait mettre les voiles jusqu'à l'enfermement. Basta!

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